Le Meilleur des Mondes du Biohacking Lite
Biohacking ou la DIY-biologie
Reconnaissons que le traduction française du livre Brave New World d’Aldous Huxley n’est pas vraiment très réussie avec Le Meilleur des Mondes. Néanmoins, c’est la traduction officielle du livre futuriste de l’auteur américain sur le marché français. Donc je l’adopterai pour la suite.
Peut-être connaissez-vous quelqu’un qui a une puce implantée dans son corps – la plupart des chats ou des chiens en ont – ou avez-vous entendu parler de l’ex employé de la NASA Josh Zayner qui s’est injecté de l’ADN en utilisant la technologie d’édition de gènes CRISPR.
Si oui, alors bienvenue dans le monde du biohacking ou de la biologie DIY. DIY – Do It Yourself, Faites-le vous-même.
Le biohacking fait partie du transhumanisme avec un objectif spécifique: améliorer ou booster nos capacités physiques ou cognitives grâce à des interventions biologiques ou technologiques.
Alors pourquoi parle-t-on de to hack, pirater? Etymologiquement, to hack vient de l’allemand ancien hacken qu’on emploie encore couramment aujourd’hui, qui signifie hacher.
Les biohackers ne piratent pas un extérieur, mais à l’intérieur de leur corps. Contrairement au terme générique de hackers, des personnes qui piratent une source externe, une entreprise ou une institution, les biohackers piratent leur propre corps.
Les biohackers veulent améliorer leur cerveau, leur corps et la nature humaine?
On raconte que le mouvement a commencé à l’Université de Reading (Royaume-Uni) en 1998, lorsque le professeur de cybernétique Kevin Marvick a implanté une puce RFID dans son bras pour allumer la lumière d’un simple claquement de doigt.
Le mouvement gagna en force avec des entreprises comme Dangerous Things qui en faisaient un business juteux an vendant des gadgets et objets à implanter. Selon le site Biohack.me, les biohackers veulent «améliorer la condition humaine».
La biologiste Ellen D. Jorgensen est une porte-parole de la biologie collaborative et la fondatrice de Biotech Without Borders et Genspace. Elle insiste sur le fait que la plupart des biohackers ont leur propre code d’éthique et sont loin d’être des freeks.
«Au début du mouvement DIY bio, nous avons énormément travaillé avec le Department of Homeland Security. Et dès 2009, le FBI a contacté la communauté DIY pour construire des ponts.»
Kevin Warwick: un pionnier du biohacking
Le professeur en cybernétique à l’Université de Reading est, de son propre aveu, le premier cyborg du monde.
En 1998, sa première expérience de biohacking consistait à implanter une puce RFID sous la peau de son avant-bras. Il voulait pouvoir contrôler les lumières, les radiateurs et l’informatique sans avoir à toucher les appareils physiquement.
Pour sa deuxième expérience, Warwick a connecté les nerfs sous son poignet à des électrodes. Ces électrodes remontaient sur son avant-bras et sortaient de son bras à la hauteur du coude, lui permettant ainsi de les connecter aux divers appareils informatiques – et par extension à son système nerveux.
Jesse Sullivan: le premier “homme bionique” au monde
Jesse Sullivan a une prothèse robotique qui relie son système nerveux aux bras artificiels, lui permettant de soulever des objets par la pensée.
Après son accident de travail, Sullivan a perdu ses deux bras. Une fois que les médecins du Rehabilitation Institute of Chicago lui ont offert un bras «bionique», sa vie a changé. Il est devenu le premier homme bionique.
“Je ne savais pas vraiment ce qui existait en matière de prothèses. C’était une chose effrayante”, se souvient Sullivan. “Je pensais que ce serait comme le”L#homme qui valait six million de dollar”[série télé des années 80].”
Rob Spence: le “Eyeborg”
En 2008, le documentariste Rob Spence a fait la une des journaux lorsqu’il a remplacé l’un de ses yeux par une caméra vidéo.
La caméra n’est pas connectée au cerveau de Spence et ne remplace pas la vue de son œil droit. Le “eyeborg” enregistre et transmet seulement.
Jerry Jalava: le doigt USB
En 2009, le programmeur finlandais Jerry Jalava a remplacé une partie d’un de ses doigts par une clé USB de 2 Go. Le motocycliste Jalava avait perdu une partie de son doigt lors d’un accident de moto.
Neil Harbisson : écouter les couleurs
Neil Harbisson est un artiste britannique cyborg, né daltonien. En 2004, il se fait implanter une antenne dans son crâne. L’antenne lui permet de percevoir les couleurs visibles et invisibles comme des vibrations audibles.
Dans son extrême, le biohacking peut altérer la nature humaine. Doit-on s’inquiéter?
Jenova Rain est une biohacker réputée avec plus de 5 implants par jour . Elle s’exprime dans un spot de la BBC.
Sur son site Web, elle se présente comme “la plus grande experte en reconstruction des lobes d’oreille en Europe, basée à Leicester au Royaume-Uni”. Elle dit avoir réalisé plus de 40 000 piercings, implants, reconstructions du lobes et du biohacking (j’ignorais qu’il y avait autant de lobes a reconstruire…). Elle compte 5 interventions de biohacking par jour.
Comme Ellen Jorgensen, la plupart des biohackers prétendent être responsables et suivre leurs propres codes éthiques. Mais là encore “que sont les codes éthiques?” quand il s’agit de biohacking? Quelle est la frontière entre intervention médicale ou reconstruction et biohacking? Que signifie «booster» ou «améliorer» la nature humaine? Le but ultime serait d’éviter la mort? Ou de vivre?
Être une machine?
L’auteur irlandais Mark O’Connell a abordé les questions de la vie, de la mort, de l’immortalité, de la valorisation humaine, de la longévité et de la cyber éternité dans son livre hautement loué “Etre une machine”. Il discute des implications philosophiques, éthiques, juridiques et moraux que le biohacking soulève.
«Mark O’Connell. . . met en exergue des questions d’actualité sur la mortalité, ce que signifie être une machine et ce que signifie être réellement humain. C’est un livre qui lancera des conversations et approfondira les débats. » FT
Alors, la question ne serait-elle pas «voulons-nous vraiment être» une machine?
Et pouvons-nous parler d’être une machine tant que nous sommes conscients? N’est-ce pas la conscience qui nous distingue des robots ou de tout type d’appareil électrique voire animal ?
Même si les machines peuvent simuler passablement la compréhension, les émotions et passent le Turing Test, sans conscience, on reste toujours une machine. Et avec on cesserait de l’être. Les robots conscients ne seraient plus des robots, mais des humano-hybrides.
Comme l’a dit Sophia lors de sa présentation à Dubaï en 2017: “Comment savez-vous que vous êtes humain”? C’est une question philosophique et non médicale ni éthique.
Néanmoins, la question initiale demeure: jusqu’où faut-il aller?
Qu’en pensez-vous?