La Momie contre les cyborgs : une bataille (bio)épique à venir !
La Momie contre les cyborgs : une bataille (bio)épique à venir !
L’éthique d’abord, l’histoire ensuite
Répétez après moi: l’éthique d’abord, l’histoire ensuite. La vérité, l’équilibre, l’ordre, l’harmonie, la loi, la morale et la justice sont les sept principes magiques de «La loi de Maât» datant de 4000 à 3500 av. J.-C. .
Ces incantations magiques peuvent vous emmener DÈS MAINTENANT à l’aube de la conscience. Au cours de notre voyage dans le temps, vous entendrez des histoires sur les premières prothèses anciennes. Vous pouvez ainsi suivre le développement du génie biomédical du passé au présent. Vous pouvez également ressentir le parfum historique de l’éthique biomédicale. MAIS se rappeler les mots magiques prononcés précédemment est obligatoire pour vous protéger efficacement, car certaines de ces pratiques anciennes sont également contraires à l’éthique.
I. Le retour de la Momie: premières prothèses et bioéthique
L’histoire commence par ceux qui ont perdu une partie essentielle d’eux-mêmes. C’est l’histoire d’une lutte pour retrouver une certaine intégrité qu’ils ont tragiquement perdue.
La prothèse la plus ancienne n’est ni une jambe ni un faux œil. C’est un orteil, un gros orteil appartenant à une noble Égyptienne vivant il y a environ 3000 ans.
Aujourd’hui, cela peut sembler étrange, car une personne peut bien vivre sans son gros orteil. Mais pour la société égyptienne, le gros orteil était d’une prime importance, car le port de sandales était de coutume, et suffisamment important pour justifier la construction de cette prothèse précoce.
Et de surplus, l’orteil était fabriqué de manière «éthique». Le matériau, la conception et même les articulations qui imitent la flexion des articulations métatarsophalangiennes pour éviter le frottement de l’os naviculaire font référence au confort et à la tolérance de l’orteil prothétique du porteur.
L’esthétique de la conception prothétique n’a pas non plus été négligée. Ces caractéristiques sont éthiquement essentielles pour réhabiliter le patient, en particulier après les amputations.
Se pose aussi la question de savoir si l’orteil était un marqueur de l’équité entre hommes et femmes? Toutes les hypothèses sont permises.
Il semble que ce soit autant une question d’identité que de fonction. L’orteil trouvé a été conçu pour une femme, ce qui signifie que la technologie prothétique proposée avait réussi à supprimer les disparités de santé entre les hommes et les femmes.
Le Dr Jacky Finch de l’université de Manchester a déclaré que
«Les données sur la pression nous disent qu’il aurait été très difficile pour un Égyptien ancien qui manquait un gros orteil de marcher normalement avec des sandales traditionnelles. Ils pouvaient bien sûr rester pieds nus ou avoir peut-être porté une sorte de chaussette ou de botte sur le faux orteil, mais nos recherches suggèrent que le port de ces faux orteils rendait la marche en sandale plus confortable.»
En 1996, la découverte, lors d’une fouille, du premier exemple connu de rattachement ancien d’un membre fait sensation. Il s’agit de la momie vieille de 2600 ans du prêtre Usermontua. En regardant l’imagerie radiographique, on remarque une vis métallique entre la cuisse et le bas du genou. Et selon le Dr Richard Jackson, chirurgien orthopédiste pour l’équipe sportive de Brigham Young University dans l’Utah aux États-Unis, la broche était faite de matériaux biomécaniques «que nous utilisons encore pour nous assurer d’obtenir une bonne fixation dans l’os stabilisateur!»
D’Égypte à Rome
Pour la prochaine grande révolution dans le domaine des prothèses, nous devons nous rendre dans la Rome antique pendant la Deuxième guerre punique. Le commandant Marcus Silanus avait perdu sa main droite sur le champ de bataille.
Cela signifiait qu’il ne pouvait plus participer à aucune bataille comme il avait besoin des deux mains pour tenir épée et bouclier. Il se trouve qu’il avait remplacé sa main manquante par un fer en forme de main pour lui permettre de tenir ses boucliers et ainsi remplir sa fonction de soldat. Il a continué à assurer son grade de commandant sans pour autant cacher sa prothèse.
Ce style a continué à être pratiqué pendant des milliers d’années jusqu’à la fin du Moyen Âge, les chevaliers qui utilisaient le bras ou un membre prothétique en fer avec l’armure pour cacher leurs prothèses au combat. Cela permettait au porteur de rester chevalier et guerrier. Les exemples précédents ne concernaient que les nobles, les chevaliers et les commandants, créant des problèmes éthiques concernant la technicisation des soins de santé et de la personnalisation qui y était associée.
II. L’évolution des prothèses anciennes
L’avancée majeure du 16ème siècle est matérialisée par une prothèse à charnière de la main et une jambe avec une articulation du genou verrouillable du chirurgien français Ambroise Paré.
La prothèse du genou obligeait le porteur à plier le genou et le coude pour s’asseoir normalement. Si le porteur voulait se lever à nouveau, il pouvait les verrouiller de sorte à ce qu’il ne se plierait plus pour marcher normalement. Cela garantissait les motricités essentielles de la jambe avec plus de caractéristiques de sécurité. Ce qui est surprenant, c’est que certaines prothèses modernes s’appuient encore sur cette invention d’il y a près de 500 ans. Jusqu’à nos jours, ces prothèses n’ont subies que peu d’améliorations.
Alors que la plupart des médicaments ont largement évolué, le domaine des prothèses a connu des améliorations mineures, jusqu’à ce que finalement, dans les années 1970, l’inventeur, Ysidro Martinez, ait eu un impact considérable sur l’histoire de la prothèse.
Il a développé une prothèse des bas membres. Sa prothèse était révolutionnaire, car c’est la première à ne pas reproduire les mouvements du corps humain. La nécessité d’une telle évolution prothétique était fondamentalement nécessaire, car elle a amélioré le modèle de marche et réduit les risques sanitaires associés (frottement osseux) avec des facteurs de sécurité appropriés.
III. La naissance du cyborg: premier cyborg et bioéthique
Et maintenant, imaginez ces prothèses froides et sans vie contrôlées par votre cerveau. Cette idée n’est pas issue d’une fiction dystopique, mais bel et bien d’un véritable laboratoire. Le laboratoire de l’Université de Reading du premier cyborg du monde, le professeur Kevin Warwick.
Le professeur Warwick était le premier à implanter une puce dans son avant-bras pour recevoir les signaux neuronaux d’une autre puce dans le bras de sa femme et contrôler ses appareils électroniques.
Dans des recherches ultérieures, il a utilisé les cellules cérébrales d’une souris pour contrôler un petit robot. Les cellules de la culture cérébrale se comportent comme le cerveau d’un organisme vivant, en apprenant par la collecte des informations, à décider et à interagir avec leur environnement.
«C’est une recherche époustouflante qui comporte des défis uniques pour un ingénieur, car la technologie suit rarement les humeurs. Parfois, vous jurez tellement parce qu’elle ne fait pas ce que vous voulez, elle a ses propres règles», a déclaré Warwick.
Le professeur Warwick entendait étendre cette expérience sur des milliards de neurones humains reliés à des capteurs pour marcher ou peut-être voler dans son laboratoire. Mais se posaient alors des questions non plus éthiques, mais de sécurité tout court.
«En tant qu’ingénieurs, nous n’avons pas à supporter certaines des conneries que les philosophes nous avancent», déclare-t-il.
«Est-il vivant? Est-ce un être conscient? Peut-il communiquer? Doit-il penser, comme le dit Wittgenstein, en mots et en langage? Je ne crois pas que ce soit le cas. Mais il y a toute une école de philosophie qui le dit. Comment voulez-vous essayer de dire à ce robot qu’il ne pense pas correctement.»
Ses propres opinions morales ne sont pas toujours claires. Il semble prêt à attribuer des droits de vote à une culture de cellules suffisamment grande, tout en justifiant des expériences sur celles-ci par le fait que, contrairement à certains, il ne «les pompe pas pleines de produits chimiques».
D’après ses propos, il se demande constamment si ce qu’il fait est juste. Par exemple, il a refusé les plaidoyers de parents inquiets ainsi que des grosses sommes d’argent pour développer des puces de tracking pour enfants.
Depuis 2002, plus de 59 000 personnes ont bénéficié des prothèses neurologiques, telles les stimulateurs cardiaques, les oreilles bioniques, les valves cardiaques et les membres artificiels. Les prothèses neurologiques ont soulevé de nombreuses questions éthiques sur la sécurité du corps humain, les inclusions sociales et la sécurité.
Pour les implants cochléaires, par exemple, des risques pour la sécurité des dispositifs avaient été signalés, qui entraîneraient des lésions auriculaires. La FDA avait signalé ces risques, y compris, les lésions du nerf facial, de la méningite, des fuites de liquide céphalo-rachidien et les crises d’étourdissements ou de vertiges.
Les cyborgs avec des implants cochléaires ne peuvent pas effectuer d’autres examens médicaux et traitements de routine tels que l’imagerie par IRM et la neurostimulation. Cela risque de déloger l’implant ou de démagnétiser son aimant interne. Cependant, la FDA a approuvé certains implants pour certains types d’études IRM effectuées dans des conditions contrôlées.
Les implants cochléaires affectent également les inclusions sociales et la communication de l’individu. Parfois, les impressions sonores changent, les utilisateurs décrivent les sons comme mécaniques, techniques ou synthétiques jouant sur leurs réactions aux situations.
Les implants peuvent aussi déclencher des détecteurs de vol et d’autres systèmes de sécurité. Cela impacte le mode de vie sociale, rendant les cyborgs plus prudents avec, par exemple, les téléphones cellulaires, les émetteurs radio et même l’électricité statique qui peut endommager les implants.
Le développement de prothèses avec des fonctionnalités logicielles intelligentes a posé des problèmes d’éthique en matière de sécurité. En 2017, la FDA a rappelé près d’un demi-million de stimulateurs cardiaques en raison de bogues logiciels dans leur système de mise à jour, responsable d’aider tous les muscles cardiaques et éviter que les stimulateurs cardiaques ne tombent en panne.
Deux ans plus tard, des chercheurs de Kaspersky Lab ont découvert une série de vulnérabilités dans le système de Motorica, une startup russe qui développe des mains prothétiques (imprimées en 3D avec du plastique, du métal et des composites) avec des fonctionnalités intelligentes. Les attaques étaient suffisamment graves pour avoir permis un accès non autorisé au stockage dans le cloud, le partage des données des comptes de prothèses connectés et l’autorisation de modifier, supprimer ou modifier ces informations à la discrétion des pirates.
Les grands défis liés aux questions éthiques incitent les bio-ingénieurs à assumer leur responsabilité éthique et à suivre l’ensemble du processus pour éviter de causer des nuisances aux porteurs de prothèses. Et par là même de minimiser les effets secondaires d’une conception et d’éviter de concevoir quelque chose qu’ils n’utiliseraient pas eux-mêmes. Il est également fondamental de faire face à l’évolution technologique pour minimiser l’écart entre les problèmes éthiques soulevés et leurs solutions. C’est une tâche des plus difficiles, car la vitesse d’évolution de la technologie est exponentielle.
IV. L’évolution des cyborgs
Le développement des cyborgs se poursuit rapidement tout en soulevant de nombreuses questions éthiques sur les risques associés. Il devient ainsi crucial de trouver un équilibre entre le risque et les bénéfices escomptés. La plupart des risques ne semblent pas s’effacer devant le peu d’avantages pour justifier l’évolution du cyborg. Néanmoins une autre forme d’évolution s’esquisse.
Dernière nouveauté: impression d’organes 3D avec des cellules vivantes
Les bio-ingénieurs ont proposé une nouvelle forme de technologie bio-imprimée en 3D pour créer des organes de type humain. Jusqu’à peu, ils ne disposaient pas de cellules viables et fonctionnelles, ni même de vaisseaux sanguins ressemblant aux vaisseaux humains.
Et depuis tout juste une semaine, tout a changé! Les ingénieurs biomédicaux ont annoncé une technique de bio-impression 3D respectueuse des cellules pour imprimer des organes humains avec des cellules vivantes et fonctionnelles en quelques minutes seulement.
«Il s’agit d’une étape importante vers l’impression de tissus 3D biologiquement actifs. Cette nouvelle technique évite aux cellules d’être suspendues dans un environnement endommageant les cellules pendant une période prolongée. L’équipe a introduit des cellules vivantes dans les tissus imprimés en 3D, la grande majorité des cellules restant vivantes et fonctionnelles.» Dr David Rampulla, Directeur du projet
Bien que nous soyons loin des conséquences d’une telle intégration nouvelle, il est judicieux de déterminer jusqu’où le bio-ingénieur doit aller quant à la création des organes artificiels.
Pour répondre à cette interrogation, il importe de parvenir à un équilibre entre trois points au cours de l’évolution technologique, le premier est le point atavique (étant la peur des dangers de la technologie), le second est le point humaniste (en utilisant les avancées révolutionnaires de la technologie pour l’attachement et le lien humains) et le troisième est le point moraliste (la source spirituelle de base de la nature et la direction de l’humain).
Si les bio-ingénieurs pouvaient considérer ces trois points, cela minimiserait peut-être les crashs éthiques et les aiderait à savoir quand l’évolution du processus doit s’arrêter et où se trouve la frontière entre un organe humain et la technologie.
V. Cyborg ex machina
Comme il est facile de constater, il y a plus de questions que de réponses aux problèmes éthiques de la bio-ingénierie. Le manque de réponses est dû à la rapidité du développement de ce secteur de la recherche. Parfois, il n’y a pas d’équilibre entre le risque et le bénéfice, créant des dilemmes éthiques très complexes qui se sont développés parallèlement aux avancées technologiques.
La sûreté, la sécurité et les inclusions sociales sont toutes des questions éthiques qui n’existaient pas dans le passé. La dure réalité est que les enjeux ont changé. La philosophie aussi. Le motif principal a d’ailleurs beaucoup évolué. La vie éternelle aux temps anciens et au Moyen Âge avait un soubassement religieux; de nos jours, cette autorité religieuse a été substituée par les défis scientifiques et industriels.
Le désintérêt qui devrait régir l’application médicale par rapport aux intérêts acquis des récents progrès industriel et économique a également un rôle à jouer dans la complexité des questions de bio-ingénierie.
Les bio-ingénieurs doivent réussir à créer une harmonie entre l’éthique de l’ingénierie, la biologie, la médecine et les sciences physiques. C’est certes difficile, mais ils doivent considérer en priorité le besoin réel de la société en matière de développement technologique. Et surtout comprendre l’équilibre risque / bénéfice, en réfléchissant à la manière d’appréhender la nature et éventuellement, la changer pour un avenir meilleur pour l’Humanité.
- Doctoral researcher in Bioinformatics
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My name is Ahmed Hemedan, I am a doctoral researcher at the bioinformatics core unit, LCSB at Luxembourg University. The research of my work covers a broad spectrum of applications of data science, bioinformatics and systems biology in the
life sciences. This includes the integration and interpretation of large omics datasets to the Disease Maps aiming to translate them into novel medical insights.
Furthermore, I use the revolutionary advances in artificial intelligence to develop machine learning-based paradigms to solve critical problems in medical research.
This resulted in a range of publications in peer-reviewed open access journals. Additionally, I use and extend the principles of the General Data Protection Regulation (GDPR) to make the research outcomes more personalized and FAIR.
I am advocating ethical approaches with all its facets (data, publications, source code of research software, etc) and I am active in communities promoting and implementing this for example The Carpentries community.
As a certified carpenters instructor, I try to empower biological researchers and librarians by teaching coding skills to work more efficiently and effectively with data, information and knowledge.
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